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Transmission d’entreprise familiale : quel est le bon âge pour passer le flambeau ?

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Un dirigeant de PME et d’ETI familial sur quatre a plus de 60 ans, et un sur 10 a plus de 65 ans (source : étude BPI Le Lab). L’effet des générations de babyboomers partant à la retraite est en marche, et plus d’une PME et ETI sur deux sera confrontée à une transmission dans la prochaine décennie !

Malgré l’urgence de la situation, de nombreux dirigeants tardent à préparer leur succession : 47% des 60-69 ans n’ont pas formalisé de plan de transmission, c’est 36% pour les plus de 70 ans (source : étude BPI Le Lab). Pour préserver la dynamique entrepreneuriale et ainsi favoriser la pérennité de l’entreprise, il est crucial de pouvoir organiser cette transmission, un processus qui peut prendre plusieurs années…

Chez For Talents, nous portons la conviction que l’âge du repreneur et du transmetteur peuvent impacter positivement, et a contrario négativement, le succès d’une transmission. Dès lors, quel est l’âge idéal pour transmettre une entreprise familiale ? Et quel est l’âge idéal pour reprendre une entreprise familiale ?

Quel est l’âge idéal pour transmettre une entreprise familiale ?

Dans les études disponibles, il n’existe pas de consensus absolu sur l’âge limite pour transmettre, mais plusieurs experts s’accordent sur l’importance d’initier le processus de transmission bien avant 65 ans. Le cabinet KPMG et le METI recommandent de commencer à préparer la transmission dès 55 ans, leur étude révèle que seulement 38% des chefs d’entreprises familiaux ont effectivement transmis leur entreprise à 65 ans !

Selon un rapport de BPCE L’Observatoire publié en mai 2019, « la rentabilité économique et la rentabilité financière décroissent nettement dès que le principal dirigeant est âgé de plus de 60 ans. ». Ce phénomène est particulièrement marqué pour les PME de 10 à 49 salariés. Deux raisons principales sont amenées : la baisse de la productivité et la baisse continue du taux d’endettement à mesure que l’âge avance, au détriment du développement. Les dirigeants de plus de 55 ans ont ainsi tendance à privilégier la stabilité à la croissance, qui nécessite une autre prise de risque.

Une étude menée par l’université italienne Bocconi de 2007 à 2016 sur les entreprises familiales confirment ainsi l’impact de l’âge du dirigeant sur la performance de l’entreprise.

Au-delà du vieillissement progressif des dirigeants des entreprises familiales (24,4% ont plus de 70 ans en 2016 contre 13,8% en 2007), pour les dirigeants de plus de 70 ans, on constate une baisse de 1,2 point du ROE*, et une baisse de 0,9 point du taux de croissance du chiffre d’affaires.

McClelland, Barker et Oh (2011) soutiennent également ce point de vue, par l’angle de l’influence de l’horizon de carrière et de l’ancienneté des PDG sur les performances futures des entreprises. En analysant le rendement des actifs (ROA) futur et la performance boursière de plus de 200 entreprises du S&P 500 en fonction de l’âge et de l’ancienneté des PDG, les chercheurs avancent que, à partir de la soixantaine :

  • Plus les PDG approchent l’âge de 65 ans, plus ils adoptent des stratégies prudentes, impactant négativement les performances futures. Cette tendance est d’autant plus forte, si le CEO est actionnaire.
  • La durée allongée du mandat d’un PDG dans une entreprise, si elle peut permettre une meilleure compréhension des enjeux, peut également les conduire à une plus grande rigidité ou à s’attacher à des méthodes déjà éprouvées, ce qui nuira aux performances dans les industries dites dynamiques.

Quel est l’âge idéal pour reprendre une entreprise familiale ?

Les recherches suggèrent qu’il se situe généralement entre 35 et 45 ans. Cette tranche d’âge permet d’avoir acquis une expérience professionnelle suffisante et d’avoir développé une certaine maturité personnelle, tout en conservant le dynamisme nécessaire pour insuffler un nouvel élan à l’entreprise.

L’étude de l’université Bocconi citée plus haut met ainsi en lumière le fait que les jeunes dirigeants (moins de 50 ans) d’entreprises familiales, sont associés à des performances supérieures. Ils enregistrent une augmentation de la rentabilité des capitaux propres (ROE) et de la croissance des revenus, tandis que les entreprises avec des dirigeants de plus de 70 ans ont tendance à sous-performer. Dans les grandes entreprises (chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros), l’impact est marqué, puisque les dirigeants de moins de 50 ans ont vu une augmentation de 1,4 point du ROE et une hausse de 1,7 point du taux de croissance du chiffre d’affaires.

L’âge du dirigeant joue donc un rôle crucial dans le succès et la trajectoire de croissance des entreprises familiales. Et en effet, les nouvelles générations opèrent des revirements stratégiques bénéfiques pour l’entreprise : ainsi, 51% de la nouvelle génération envisagent de prendre davantage de risques que leurs prédécesseurs et 56% affirment qu’ils vont infléchir la stratégie de l’entreprise familiale (Etude Next Generation Family businesses – Deloitte 2016).

Reprendre une entreprise familiale est par ailleurs un véritable projet entrepreneurial, d’autant plus quand le repreneur familial prend un risque en rachetant les parts au fondateur. Une étude réalisée aux Etats-Unis (« Age and High-Growth Entrepreneurship » – Azoulay 2020) montre que l’âge moyen des fondateurs des entreprises ayant la croissance la plus rapide est de 45 ans. On y voit également que l’expérience préalable des entrepreneurs dans le secteur où ils créent leur entreprise est déterminante pour le succès (par exemple, les fondateurs ayant plus de trois ans d’expérience dans leur secteur sont 2,5 fois plus susceptibles de créer une entreprise à très forte croissance que ceux sans expérience.). Si on ne parle pas ici directement de repreneurs familiaux, cela nous incite à confirmer nos hypothèses de succès pour un repreneur entre 35 et 45 ans.

Et d’ailleurs, en France, une tendance encourageante émerge : les dirigeants d’entreprises familiales sont de plus en plus jeunes. Selon l’étude Bpifrance, 10% des dirigeants d’entreprises familiales ont moins de 40 ans, soit deux fois plus que dans les entreprises classiques !

À transmettre trop tard, on risque de ne jamais transmettre ?

L’un des constats majeurs de l’étude « La cession-transmission des entreprises en France » (BPCE L’Observatoire, mai 2019) est que le vieillissement des dirigeants devient un obstacle croissant à la transmission d’entreprises. En effet, à trop tarder à transmettre et à ne pas préparer la transmission, le temps de latence entraîne une moindre performance et peut compromettre l’attractivité de l’entreprise en termes de reprise.

De plus, les dirigeants familiaux qui attendent trop longtemps pour transmettre peuvent faire face à un décalage avec la nouvelle génération qui peut entraîner des différends sur la vision et la stratégie de l’entreprise.

Et puis, déjà en 1999, John A.Davis nous mentionnait que la collaboration père-fils est en général la plus productive lorsque le père a entre 50 et 60 ans et le fils entre 30 et 40 ans ! Ce qui fixe cette période à la phase de transition nécessaire pour assurer une transmission réussie.

Pour contribuer à la réussite de la transmission d’entreprise familiale, chez For Talents Transmission, nous recommandons :

  • Pour les transmetteurs, de commencer à planifier leur transmission dès 55 ans et de viser une transmission effective autour de 65 ans, en fait l’âge permettant de construire un projet pour l’après. Ceci sera de nature à pérenniser la performance de l’entreprise.
  • Pour les repreneurs familiaux, idéalement reprendre l’entreprise dans la tranche d’âge 35-45 ans, avec une expérience professionnelle solide et la capacité à innover tout en respectant l’héritage familial.
  • Pour les deux parties, s’assurer d’une période de transition pour permettre un transfert des connaissances et responsabilités. Le transmetteur peut poursuivre l’aventure familiale avec un rôle non plus de dirigeant, mais plutôt de conseiller au service du repreneur.

 

* (entreprises entre 20 et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires), (ROE = résultat net / capitaux propres)

Sources :

McClelland, P. L., Barker, V. L., & Oh, W.-Y. (2012). CEO career horizon and tenure: Future performance implications under different contingencies. Journal of Business Research, 65(9), 1387-1393.John A.Davis “The influence of life stages on father-son work relationships in Family Companies”

BPCE L’Observatoire. (2019). La cession-transmission des entreprises en France.

Gilles, C., Trannoy, A., Baéna, A., Flamand, L., & Tannani, M. (2022). Quelle performance des entreprises créées par les seniors ? France Stratégie. strategie.gouv.fr

Deloitte. (2016). Next-generation family businesses: Evolution, keeping family values alive.

KPMG France & METI. (2021). Transmission des ETI et des entreprises familiales : un enjeu de compétitivité et de souveraineté économiques. Age and High-Growth Entrepreneurship – Azoulay 2020

Bpifrance Le Lab. (2023). Les entreprises familiales à l’épreuve des générations.

Corbetta, G., Quarato, F., & Minichilli, A. (2017). The AUB Observatory Report on Italian Family Firms: Ninth Edition.

Perrine Julien

Par Perrine Julien
Manager Accompagnement Transmission

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